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03 juillet 2025
La performance des réseaux, nouvelle composante de la mouture 2025 des redevances agences de l’eau
Les collectivités et exploitants en charge des services eau potable et assainissement pourraient avoir à répondre aux questions des abonnés les plus curieux voire économes : mais que sont donc ces nouvelles redevances relatives à la performance des réseaux ?

La mise en place et le maintien de la performance des réseaux eau et assainissement sont dans le collimateur de l’Europe et du législateur français depuis les années 1990. Le dispositif du Grenelle de l’environnement (fin des années 2000), avec ses objectifs de rendement, nous a donné en son temps une petite clef pour comprendre l’actualité. Car si le galimatias de "conduites" et autres "collecteurs" reste invisible à l’œil de la rue, la raréfaction de la ressource est en marche, les coûts liés à l’épuration des eaux suivent le mouvement, et le principe de réalité rattrape son monde.
Pourquoi ? Parce que l’état des réseaux eau et assainissement (plusieurs centaines de milliers de kilomètres) fait encore triste mine en France. Les études à ce sujet ne manquent pas.
Alors nouvelle peau pour le cadre législatif et réglementaire ! Et une loi de finances pour 2025, et un décret n°2024-787 du 9 juillet 2024 contenant les dispositions d’application des futures redevances sur la consommation d’eau potable, en lien avec la performance des réseaux d’eau potable et la performance des systèmes d’assainissement (décret assorti de deux arrêtés datés du 5 juillet 2024) !
Il suffit de lire les titres des textes : la performance des réseaux entre aujourd’hui dans les critères de calcul des redevances Agences de l’eau. Les redevances, ces ressources prélevées auprès des personnes publiques et privées afin de financer des opérations et programmes compensatoires des atteintes aux ressources en eau, aux milieux et à la biodiversité... Une surprise ? Pas vraiment, si l’on considère que la réforme des redevances des agences de l’eau était en discussion depuis 2023, et faire l’autruche ne dure qu'un temps. La réforme, aujourd’hui, nous tire au col : l’eau doit arrêter de fuiter et le rendement épuratoire être au rendez-vous.
Le système des redevances se renouvelle en conséquence : bonjour à la nouvelle redevance consommation d’eau potable, à la redevance performance assainissement et à la redevance performance eau potable ! (Et byebye les vieilleries redevance pollution domestique et autres redevances modernisation des réseaux pour les collectes domestique et non domestique.)
Le 1er janvier 2025, ces nouvelles redevances "incitatives" ont débarqué et les factures des abonnés vont changer de visage. La mécanique des "redevances", c’est un peu toujours la même chose : les abonnés paient, et les services de distribution d’eau potable et d’assainissement reversent aux agences. Mais le signal envoyé par la réforme est clair : si les services publics n’ont pas pris toutes les précautions utiles et à même de garantir un niveau de performance et de conservation patrimoniale, l’euro de l’abonné compensera ce manque : il suffit de laisser à son maxima la part redevances performances. Pas d’abattement !
La transformation des redevances se veut donc appel à l’action. L’assiette des redevances est basée sur les m3 d’eau facturés au titre de chaque service (AEP/assainissement) et les modalités de calcul des abattements visent très directement l’effectivité des efforts d’entretien du patrimoine et de performance des services. À charge aux collectivités de déployer de nouveaux efforts de maîtrise des fuites, de connaissance patrimoniale et d’efficacité globale de la mission assainissement. C’est du pragmatisme, mais voilà : le pragmatisme a un coût. Payer aujourd’hui, économiser demain. Un exemple de coût utile ? Détection des fuites, et cartographie des résolutions de pépins par S.I.G. !
Les régies d’eau volontaristes agiront directement, ou les collectivités mettront la pression sur leurs délégataires. Il leur faudra alors : 1) établir des cahiers des charges tenant compte de la nouvelle donne et 2) veiller à piloter la négociation possible avec les candidats dans la procédure concessions, dans un esprit de performance.
Mais bénéficier d’un abattement favorable sur une redevance ne reste qu’une fraction du problème du coût payable au titre de la gestion de l’eau. Un abattement obtenu sur la fraction d’une redevance ne veut pas dire que le coût global de la mission ni que le prix payé par celui qui consomme baissera : à partir du moment où vous chargez la mule du missionnaire (ce qui ne manquera pas de se produire, notamment au regard des exigences à venir du cadre européen sur les performances épuratoires), le coût de la mission augmente.
Et cette mission peut ne pas être piquée des vers ! Nous incluons au bagage du missionnaire la gestion des questions et réclamations des consommateurs, jamais vraiment heureux de se dire qu’ils déboursent aujourd’hui pour rattraper un temps perdu hier. Le temps d’explication, lui, ne se compte pas toujours, et peut être consommateur d’énergie… humaine.
* Expression empruntée à une présentation de la réforme des redevances par l’Agence de l’eau Adour-Garonne
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Présentation de la réforme
https://eau-grandsudouest.fr/sites/default/files/2024-11/Pr%C3%A9sentation%20Webinaire%2012-07_0.pdf
Textes de référence
- Décret n° 2024-787 du 9 juillet 2024 portant modifications des dispositions relatives aux redevances des agences de l'eau, lequel contenait les dispositions d’application des futures redevances sur la consommation d’eau potable, en lien avec la performance des réseaux d’eau potable et la performance des systèmes d’assainissement
- Arrêté du 5 juillet 2024 relatif aux modalités d'établissement de la redevance sur la consommation d'eau potable et des redevances pour la performance des réseaux d'eau potable et pour la performance des systèmes d'assainissement collectif
- Arrêté du 5 juillet 2024 relatif au montant forfaitaire maximal de la redevance pour la performance des réseaux d'eau potable et de la redevance pour la performance des systèmes d'assainissement collectif pris en compte pour l'application de la redevance d'eau potable et d'assainissement prévue à l'article L. 2224-12-3 du code général des collectivités territoriales